Critique – Le Virus Morningstar – Tome 1 : Le Fléau des Morts

Couverture du roman : Le virus Morningstar, Tome 1 : Le fléau des morts

Le Fléau des morts est le premier tome de la série le Virus Morningstar édité en France par Eclipse. Au programme : que se passerait-il si une maladie transformait les êtres humains en zombie ?
Avec un thème aussi classique, on peut redouter une impression de déjà vu, heureusement l’intrigue est suffisamment bien menée pour nous tenir haleine jusqu’à la dernière page.

Synopsis

Deux officiers américains correspondent par courriel. La première, chercheuse dans un laboratoire de recherche biologique, s’inquiète de la virulence d’un virus tout juste découvert dans la jungle africaine. Elle prescrit à son interlocuteur sur le terrain d’appliquer des mesures propres à éviter une éventuelle contagion.
Celui-ci, un général expérimenté et pragmatique, est cependant soumis aux ordres des politiciens de tout bord qui rejettent toute action susceptible de nuire à l’activité économique.
Très vite, quelques individus à l’étrange comportement cannibale sortent de la forêt et attaquent un aérodrome…

Critique

Un roman de genre

La littérature populaire a souvent été considérée comme un sous-genre, une production industrielle indigne d’attirer l’attention de la critique.
Pourtant, ces romans constituent souvent un bon reflet d’une époque et des préoccupations des individus. Les romans-feuilletons si populaires du 19ème siècle témoignaient de la réalité sociale de leur temps. Les Romans d’espionnage des années 1950 et 1960 traduisaient un état d’esprit typique de la guerre froide. Quant aux romans policiers, d’Edgard Allan Poe à Fred Vargas, ils sont souvent l’occasion de mettre en relief les aspects obscurs d’une société.
Les générations actuelles profitent de nouveaux genres tout aussi décriés, et tout aussi intéressants : la science-fiction, l’heroic fantasy, le steampunk, et, dans le cas qui nous intéresse, des ZOMBIES.
Le fléau des morts relève justement de cette littérature populaire : une chronologie simple, des personnages définis sans ambiguïté, un style efficace mis au seul service de l’intrigue et de l’action.

Une intrigue classique mais bien ficelée

Dans la lignée de films comme Rec. et surtout 28 jours plus tard, cet ouvrage se veut une simulation réaliste de l’apparition et du déferlement d’une pandémie d’envergure mondiale.
Sauf qu’il ne s’agit pas du virus de la grippe ni même d’Ebola. Les individus contaminés par ce virus effroyablement contagieux se comportent comme de véritables enragés et n’ont plus qu’une seule activité : se ruer sur toute créature au sang chaud pour la massacrer et la contaminer à son tour. Et ils sont rapides et violents les bougres.
Le virus Morning Star 1 tue ses victimes dans 100 % des cas, mais c’est pour mieux les ressusciter en zombies qui ont le même comportement que les vivants contaminés sauf qu’ils sont beaucoup plus lents.

Des défauts sans doute…

Certes, les lecteurs familiers de la culture zombie pourront regretter ne pas retrouver un commentaire sociétal à la Roméro, utilisant l’aspect ludique du film d’horreur pour pointer férocement les défauts de ses contemporains.

D’autres déploreront la quasi-absence d’humour, dont le genre n’est pourtant pas avare, sans aller pour autant aller jusqu’à l’hilarant pastiche Shaun of the dead.
Enfin, les contempteurs de la littérature de genre rappelleront le manque d’originalité de l’intrigue, les personnages archétypaux, la morale manichéenne.

… mais un intérêt certain

Le Fléau des Morts ne brille certes pas pour son originalité, le genre zombie étant en soi très codifié et déjà très largement exploité. En outre, le roman se prête moins que le cinéma ou la BD aux surenchères de scènes gores.
L’intérêt principal que l’on peut y trouver c’est que ce roman paraît comme un miroir intéressant des idées et obsessions typiques du débat américain contemporain.
A part l’armée qui tente de faire face, bravement mais sans imagination, les institutions sont incapables de protéger leurs citoyens : politiciens paralysant le pays par leurs disputes, agence gouvernementale utilisant ses moyens considérables dans le but obsessionnel de museler les rares personnes voulant informer les citoyens, et même un agent de la CIA traitant ses contradicteurs de communistes s’ils n’admettent pas que la bible et l’unité des vrais citoyens américains suffiront à éloigner tous les dangers.
L’individu et la petite communauté que le hasard met à ses cotés sont seuls face à la menace, et doivent prendre en main leur destin.
Le vieil oncle armurier, cloîtré dans sa cabane isolée, pestant contre le gouvernement et tirant sur tout ce qui s’approche apparait comme le plus lucide puisqu’il est finalement le seul à s’être préparé pour survivre.
L’avant propos insinuant l’existence d’une conspiration gouvernementale autour des laboratoires de recherche biologique pourrait le laisser penser.

Ce livre de Z.A. Recht semble être le reflet des interrogations et les angoisses d’une population hantée par l’idée que la civilisation comme on la connaît est à la merci d’un catastrophe inattendue et brutale.
Finalement, à travers les aventures de ses personnages se battant pour leur survie, l’auteur interroge son lecteur : Comment réagiriez vous si vous perdiez tout vos repères ? Si vous ne pouviez plus compter que sur vous-même ? Quels seraient vos objectifs ? Quels choix feriez vous ?

Un bon moment de distraction

Au final, le Fléau des Morts est un livre agréable et fait passer un bon moment. Sur un sujet déjà largement traité, le style carré et direct est accrocheur mais l’intrigue bien que prévisible reste assez bien menée pour qu’on ait envie d’aller jusqu’à la fin pour savoir qui va s’en sortir et qui va y rester.

Réticence personnelle

A l’instar du dessinateur Boulet, je m’étonne toutefois que les protagonistes – et particulièrement les militaires – s’obstinent à essayer d’arrêter des hordes de zombies avec des fusils d’assaut ou même des pistolets.
Théoriquement l’armée américaine à les moyens de bruler les contaminés avec des moyens plus conséquents comme le lance-flammes ou le napalm. Les missiles ne sont pas dans leur silo pour décorer le sous sol américain, c’est un moyen efficace pour désinfecter en mode confettis.

Mais il faut être honnête, si les personnages du roman connaissaient un peu la culture zombie, comme quasiment tout le monde*, l’invasion serait arrêtée en dix minutes ce qui ne constituerait pas un récit très palpitant.

En ce qui concerne la qualité de l’édition, je vous renvoie à l’article sur les revenants de Whitechapel, dans la même collection.

*La plupart de mes connaissances se débrouilleraient nettement mieux dans le même cas.

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